Le chômage est une réalité au Cameroun. La décision du Chef de l’Etat de recruter 25000 jeunes diplômés
dans la fonction publique est une mesure incontestée pour réduire ce taux de chômage, bien que cette mesure ne soit pas forcement bénéfique à l’Etat du Cameroun. Récemment, le Cameroun occupait, une fois de plus, un classement peu reluisant, ses Universités d’Etats ne figurant pas parmi les 100 meilleures Africaines. Forcement, cela peut avoir un impact négatif sur la qualité des diplômes délivrés sur la scène nationale et internationale. Il est clair qu’une Université qui forme mal ne trouvera pas sa place parmi les meilleures. S’il est de notre intérêt de savoir ce qui peut être à l’origine de ce mal pour remédier au plus vite à cette situation, permettez-moi de m’interroger : le mode de recrutement dans certaines Universités ne contribue-t-il pas à mettre sur le marché de l’emploi des diplômés qui ne savent pas faire grand-chose ?Pour trouver des idées qui mettront la majorité d’accord, il faut s’étendre sur la notion d’enseignant chercheur dont les Universités Occidentales utilisent et qu’on s’est empressé d’embrasser sans toute fois savoir si cela correspondrait à notre contexte. Un enseignant chercheur est celui là qui doit en parallèle mener des activités de recherche et dispenser des connaissances aux apprenants. C’est en faite l’association de deux activités dont l’une (chercheur) s’acquiert par expérience et l’autre par apprentissage. On apprend à être enseignant alors qu’on devient chercheur dans la durée, suite à l’accumulation de plusieurs expériences. On pourra par exemple être un très bon chercheur dès le niveau bac+4 sans toutefois être un enseignant au dessus de la médiocrité à bac+10, sauf si cela vous vient de la providence.
Un manque de formation en pédagogie
Tout comme aux niveaux maternel, primaire et secondaire, les personnes qui dispensent des cours dans les Universités doivent, bien avant leur recrutement, avoir suivi avec succès les cours de pédagogies dans une école normale. Ceci est d’une importance capitale dans la mesure où, pour enseigner, il ne faut pas seulement détenir des connaissances dans un domaine précis, il faut aussi savoir comment transmettre ses connaissances, c’est-à-dire être capable d’identifier les difficultés des apprenants et trouver l’approche d’enseignement qui cadre avec les apprenants, l’approche qui permettra d’éclaircir les apprenants, ce qui est atteint lorsque les enseignements sont assimilés.
Les recrutements dans l’enseignement supérieur, en plus de s’intéresser aux candidats possédant un niveau académique élevé, une préférence devrait être faite aux candidats ayant suivi des études de pédagogie lorsque ceux-ci ont le même niveau académique. Bien entendu, les publications à caractère de recherche doivent aussi compter.
Telle est la conduite à suivre lors du recrutement dans l’enseignement supérieur, conduite qui pourra engendrer la présence d’un nombre important d’enseignants conscients dans ce niveau d’enseignement, des enseignants capables d’offrir le sacrifice qu’on attend d’eux, comme le font plusieurs enseignants des niveaux inférieurs.
Une fois recruté, l’enseignant du supérieur qui en général est aussitôt responsable d’un nombre non moins important d’enseignements doit être capable de revoir son cours régulièrement afin que celui-ci soit orienté vers des acquisitions qui permettront aux apprenants d’avoir une formation actualisée, c’est-à-dire une formation qui leurs donneront les compétences recherchées. C’est d’ailleurs ce que recommande le système LMD.
Est-ce le cas au Cameroun ?
Malheureusement, la réalité au Cameroun est autre, surtout au niveau des établissements publics de l’enseignement supérieur. Il est très mal vu de postuler à un poste de l’enseignement supérieur public lorsqu’on est enseignant du secondaire, ceci, même quand vous possédez un Doctorat. Quelques calculs sont souvent mis en jeu pour faire de ce recrutement une guerre de positionnement à des fins égoïstes lorsqu’elles ne sont pas tribalistes. On se retrouve alors dans des situations où on préfère retenir un candidat moins diplômé au sacrifice de celui plus diplômé dans la même discipline, au sacrifice plus ou moins direct des étudiants. Le comportement des enseignants qui estiment être sous la protection des dirigeants est connu : surestimation, manque de respect envers la hiérarchie, les cours dans la quasi-totalité bâclés pour ne citer que ceux-ci. On arrive alors à des situations où les étudiants sont tout le temps gênés et embarrassés durant les enseignements. Soyez sûrs, la mention sera acquise en fin de semestre parce que ceux-ci n’ayant que fait le tiers du programme, ils interrogeront alors sur des exercices qui ne viennent de nul part et partageront ainsi et de manière aléatoire les 10, 15, 19 sur 20 pour faire taire les étudiants qui en général jouent le jeu, ayant constaté par miracle qu’ils ont validé sans savoir que les lacunes accumulées durant la formation ont toujours les répercussions plus tard, surtout lorsqu’il se fait déjà presque tard. Bonjour le chômage.
L’entrée dans « le domicile du chômage » est presque une certitude. On ne peut pas réussir à un concours même objectif, car on se retrouve souvent entrain de candidater à un niveau mentionné sur un bout de papier (Diplôme) sans que les acquis nécessaires pour valoriser ce diplôme ne soient présents. Après deux à trois essais, on fait recours à toute la famille afin de rassembler une certaine somme d’argent qui permettra de mettre en avant la corruption pour trouver une place, lorsque le trafic d’influence n’est pas utilisé.
Alors, qui est responsable de cette situation ?
Il est clair que, selon le côté qu’on se trouve, on jettera le tort au camp d’en face. En réalité, au regard de l’évolution de la situation au Cameroun et le comportement des uns et des autres, toute la structure est responsable.
Les étudiants (et leurs familles) qui ne s’inspirent pas de la situation de chômeurs que vivent leurs aînés afin de mieux orienter leur cursus universitaire à travers des stages qui apporteront de la valeur ajoutée à leur formation. Que ce stage soit rémunéré ou non, peu importe car celui-ci aura une influence plus tard. En plus, des formations transversales doivent être effectuées durant sa formation universitaire afin d’être compétitif le moment venu, c’est-à-dire dès l’obtention du diplôme universitaire recherché. Bien entendu, le diplôme doit refléter l’ensemble des connaissances obtenues. Le désintérêt de la jeunesse estudiantine au Cameroun des formations universitaires de l’Etat est une indication claire de la mauvaise qualité des enseignements qui y sont dispensés. Mais malheureusement pour s’en passer, il faut être issu d’une famille assise financièrement, car les prix de la formation dans les établissements privés ne sont pas toujours à la portée du citoyen ordinaire.
Le rôle de l’Etat étant d’offrir une formation de qualité à sa jeunesse, la qualité de la formation tant dans le privé que dans le public devrait donc être suivie par l’Etat. En parcourant les amphis théâtres, ou en se rapprochant des étudiants, il est facile de déceler les enseignants qui ne font pas leur travail et d’appliquer des décisions efficaces, comme cela se fait d’ailleurs aux niveaux maternels, primaires et secondaires avec les visites inopinées des inspecteurs qui viennent examiner le travail rendu par les enseignants.
Fierté est de constater que dans l’enseignement supérieur privé au Cameroun, plusieurs promoteurs appliquent déjà cette formule afin d’assurer une bonne formation et d’attirer plus d’étudiants au fil des années. Les délégués des étudiants examinent le comportement et l’assiduité des enseignants et font un rapport au promoteur. Les enseignants qui sont généralement tirés parmi les meilleurs enseignants titulaires de certains enseignements dans le public ont dans la plupart des cas un rendement satisfaisant dans les établissements privés et moyen ou en dessous de la moyenne dans les établissements publics, car la quasi-totalité des diplômés de ce dernier type d’établissement sont en chômage. Preuve que l’Etat devrait faire quelque chose tant au niveau du recrutement des enseignants qu’au suivi de la qualité des enseignements dispensés par ceux-ci.
Auteur:
Merlin SIMO TAGNE
Ph.D en Physique-Energétique
Spécialisé en Analyse des Technologies
de l’Energie et de l’Environnement
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