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L’Iran libère la chercheuse australo-britannique Kylie Moore-Gilbert

 Image de Kylie Moore-Gilbert diffusée par la télévision iranienne, mercredi 25 novembre 2020. 
Cette spécialiste du Moyen-Orient à l’Université de Melbourne avait été arrêtée à Téhéran et condamnée par la suite à dix ans de prison pour « espionnage ».

C’est la fin d’une « épreuve traumatisante » a déclaré Kylie Moore-Gilbert. Détenue en Iran depuis 2018 et condamnée pour espionnage au profit d’Israël, la chercheuse australo-britannique a été libérée, mercredi 25 novembre.

« Un homme d’affaires et deux citoyens iraniens, détenus à l’étranger sur la base de fausses accusations, ont été libérés en échange d’un espion de double nationalité travaillant pour le compte du régime sioniste », a annoncé Iribnews, le site de la télévision d’Etat en donnant le nom de Mme Moore-Gilbert, sans autre précision sur l’échange.

Iribnews publie simplement une vidéo sans commentaires montrant trois hommes non identifiables accueillis avec les honneurs par le vice-ministre iranien des affaires étrangères Abbas Araghchi, ainsi que quelques plans de Mme Moore-Gilbert accompagnée par l’ambassadrice d’Australie à Téhéran, Mme Lyndall Sachs.

Une « épreuve longue et traumatisante »

Après plus de 800 jours de détention, cette spécialiste du Moyen-Orient a reconnu que son départ d’Iran serait « doux amer » en dépit des « injustices » subies. « Je suis venu en Iran en amie, avec de bonnes intentions », a-t-elle affirmé dans un communiqué publié par le gouvernement australien, dans lequel elle rend aussi hommage aux Iraniens « chaleureux de cœur, généreux et braves ». La chercheuse a aussi salué dans ce texte la fin d’une « épreuve longue et traumatisante », ajoutant que le soutien qu’elle a reçu en détention « était ce qui comptait le plus pour » elle.

Le premier ministre australien Sott Morrison, qui s’est entretenu avec la chercheuse, a salué cette libération. « C’est une personne extraordinairement forte, intelligente et courageuse, capable de dépasser ce calvaire », a-t-il déclaré à la télévision Channel 9.

« Une bonne nouvelle en provenance d’Iran, c’est rare », a aussi réagi Amnesty International sur Twitter. « C’est un énorme soulagement d’entendre parler de sa libération. »

Lettres clandestines

Selon le quotidien britannique The Guardian, Kylie Moore-Gilbert, spécialiste du Moyen-Orient à l’Université de Melbourne aurait été arrêtée en septembre 2018 à l’aéroport de Téhéran après avoir participé à une conférence académique en Iran et condamnée par la suite à dix ans de prison pour espionnage. Son arrestation avait été confirmée en septembre 2019 mais sa famille a indiqué qu’elle avait été incarcérée plusieurs mois auparavant.

Elle a toujours nié être une espionne. Dans des lettres sorties clandestinement de prison et publiées en janvier par le Guardian et le Times, elle disait avoir refusé une offre des Iraniens d’espionner pour leur compte. Dans l’un de ces dix documents manuscrits adressés dans un persan rudimentaire aux autorités iraniennes, elle faisait part de son « rejet officiel et définitif » de l’offre de « travailler avec le service de renseignement des Gardiens de la Révolution », armée idéologique de la République islamique. « En aucun cas, je ne serai persuadée de modifier ma décision », écrivait-elle. « Je ne suis pas une espionne. Je n’ai jamais été une espionne. »

Elle expliquait aussi s’être vu proposer une alternative lors de l’appel de sa peine : soit une peine de treize mois de prison, qui lui aurait permis d’être libérée, soit une confirmation de sa condamnation à dix ans d’emprisonnement. Se sentant « abandonnée et oubliée », Kylie Moore-Gilbert évoquait également dans ces missives écrites entre juin et décembre 2019 une existence précaire et faite de privations, sans visites ni appels, ainsi que des problèmes de santé récurrents.

Série d’arrestations

Signant « une prisonnière politique innocente », elle demandait à être transférée dans la section générale des femmes de la prison d’Evine à Téhéran, après des mois en isolement dans une petite cellule éclairée en permanence ayant « porté gravement atteinte » à sa santé. Finalement transférée dans cette section, elle y a côtoyé l’universitaire franco-iranienne Fariba Adelkhah et l’Irano-Britannique Nazanin Zaghari-Ratcliffe. Son comité de soutien a rapporté fin octobre qu’elle avait été transférée à la prison pour femmes de Qarchak, réservées aux détenues de droit commun.

Détenue depuis juin 2019 et condamnée à cinq ans de prison pour « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale » et « propagande contre le système » politique de la République islamique (accusations qu’elle nie), Mme Adelkhah est détenue à domicile sous contrôle d’un bracelet électronique depuis début octobre. Depuis plusieurs mois, c’est également la situation de Mme Zaghari-Ratcliffe, condamnée à cinq ans de prison sur une accusation de complot contre la sûreté nationale, qu’elle nie, et menacée d’un nouveau procès.

Les arrestations d’étrangers en Iran, notamment des binationaux, souvent accusés d’espionnage, se sont multipliées depuis le retrait unilatéral en 2018 des Etats-Unis de l’accord international sur le nucléaire iranien et le rétablissement de dures sanctions américaines contre Téhéran.

Au cours des derniers mois, l’Iran a procédé à plusieurs échanges de prisonniers avec des pays détenant des ressortissants iraniens condamnés, en attente de procès, ou menacés d’extradition vers les Etats-Unis. Depuis le 23 novembre, le ministère des affaires étrangères allemand déconseille vivement aux binationaux possédants la nationalité iranienne de se rendre en Iran, au risque de s’y faire arrêter « sans raison compréhensible ».

Par Le Monde avec AFP

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