Depuis le début de la pandémie de Covid-19, les réseaux sociaux ont durci leurs règles contre les
messages trompeurs ou dangereux, dans le cadre de la lutte mondiale menée contre le coronavirus.Il y a eu des vidéos publiées par le président brésilien, Jair Bolsonaro, sur Instagram et Facebook, le montrant au milieu d’une foule, dimanche 29 mars, en violation des consignes officielles de son propre ministère de la santé. Un message du président vénézuélien, Nicolas Maduro, faisant la promotion d’un « remède » non testé. Un Tweet de l’actrice Alyssa Milano donnant des conseils de protection erronés contre le coronavirus. Ou encore, un Tweet raciste de l’entrepreneur John McAfee affirmant que « les Noirs ne peuvent pas attraper le virus », relayant une théorie conspirationniste populaire dans l’extrême droite américaine.
Tous ces messages ont été supprimés de Facebook, Instagram et Twitter, sur décision des équipes de modérations de ces plates-formes. Depuis mi-mars, Facebook, comme Twitter, en plus d’afficher des informations officielles de l’OMS et d’autorités sanitaires pour lutter contre la pandémie, ont en effet décidé de renforcer leurs règles de modération sur les sujets liés au Covid-19.
Le 26 mars, un communiqué de Facebook précisait ainsi que les messages présentant de « fausses affirmations à propos de remèdes ou traitements » contre le coronavirus ou « les affirmations selon lesquelles la distanciation sociale n’aide pas à lutter contre la propagation du coronavirus » seraient supprimés. Le 27 mars, Twitter communiquait sur des principes similaires de fonctionnement de sa modération pendant la pandémie.
Pour faire respecter ces règles, Facebook comme Twitter ont donc pris la décision rarissime de supprimer les messages de chefs de gouvernement. Ces plates-formes considèrent habituellement que le caractère informatif des messages émanant d’un président ou d’un chef de gouvernement nécessite de les laisser en ligne, ce qui a conduit plusieurs fois Twitter à ne pas modérer des publications problématiques de Donald Trump.
L’hydroxychloroquine en question
Dans ce contexte, Facebook et Twitter ont également supprimé ces derniers jours des messages faisant la promotion de manière trompeuse des traitements à l’hydroxychloroquine contre le coronavirus. Cette molécule utilisée dans des essais cliniques à Marseille par le professeur Didier Raoult, en combinaison avec un antibiotique, fait l’objet d’un très vif débat scientifique : les premiers résultats publiés par M. Raoult ne permettent pas d’affirmer que ce traitement est véritablement efficace.
Le 27 mars, Twitter a supprimé un message de Rudy Giuliani, l’ancien maire de New York et figure du Parti républicain, qui affirmait, à tort, que « l’hydroxychloroquine a un taux de 100 % de réussite pour soigner le coronavirus » : en réalité, même les essais à la méthodologie contestée du professeur Raoult n’affichent pas un résultat de 100 %. Facebook a également supprimé une vidéo de Jair Bolsonaro parce que le président brésilien y affirmait que l’hydroxychloroquine était un traitement efficace, ce qui n’est pas scientifiquement prouvé.
« Sont interdits sur nos plates-formes tous contenus ou fausses informations qui représentent un réel risque de préjudice physique », a expliqué Facebook au Monde. Des cas de toxicité cardiaque liés à des prises en automédication de Plaquenil (nom commercial de l’hydroxychloroquine) ont été signalés en France, notamment en région Nouvelle-Aquitaine, où des patients ont dû être admis en réanimation.
Règles « globales »
Twitter explique avoir modéré le message de M. Giuliani, comme d’autres, parce qu’il était en violation de ses règles prohibant les Tweets « pouvant aller à l’encontre des informations de santé publique communiquées par les sources officielles et qui pourraient entraîner un plus grand risque aux personnes de contracter le Covid-19 ». « Ces règles sont applicables au niveau global », confirme l’entreprise au Monde.
Ces règles de modération « globales » sont toutefois décidées aux Etats-Unis, où l’intérêt pour l’hydroxychloroquine est globalement moins fort qu’en France. Les données de recherche de Google montrent que deux très importants pics d’intérêt pour cet anti-paludéen ont eu lieu les 19 et 24 mars, dates auxquelles Donald Trump avait respectivement approuvé l’utilisation de ce médicament, puis l’avait qualifié de « don du ciel ».
Le régulateur américain du médicament, la FDA, a autorisé le 30 mars l’usage de la chloroquine et de l’hydroxychloroquine, estimant que « des rapports non confirmés suggèrent que ce médicament peut présenter un intérêt dans le traitement des patients hospitalisés », précisant que « la dangerosité de ces médicaments n’a été étudiée que [dans son usage habituel d’anti-paludéen] et non pour les patients touchés par le Covid-19 ».
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