Depuis juin dernier, les sept millions de Hongkongais défendent leurs libertés face à Pékin. Tout a
commencé en juin dernier avec des manifestations géantes contre une loi d’extradition. Mais aujourd’hui, les protestataires demandent rien de moins que la démocratie.
commencé en juin dernier avec des manifestations géantes contre une loi d’extradition. Mais aujourd’hui, les protestataires demandent rien de moins que la démocratie.
« Hongkongais, résistez ! » Ce mot d’ordre n’a rien perdu de sa force en six mois de contestation. Les 12 000 grenades lacrymogène tirées, les quelque 5 800 arrestations, les stations de métros saccagées et la mort d’un jeune manifestant ont certes ébranlé la métropole. Mais Hong Kong reste debout et uni. Étudiants et cols blancs, parents et séniors refusent la mainmise grandissante de Pékin sur l’ex-colonie britannique.
Jean-Philippe Béja, directeur de recherche émérite au CNRS, en veut pour preuve la marée humaine qui a investi les rues de la région semi-autonome le 8 décembre dernier, pour marquer l’anniversaire des six mois de contestation. « 800 000 personnes, cela prouve que la population reste totalement mobilisée, estime le sinologue. Si la cheffe de l’exécutif Carrie Lam et ses mentors de Pékin espéraient que les gens se dégouteraient, c’est raté. Les Hongkongais sont déterminés à maintenir leur identité, leur mode de vie et si possible à améliorer leur système politique. »
Faire la sourde oreille s’est soldé par un « échec complet »
Pendant de longs mois, Carrie Lam a misé sur la majorité silencieuse qui s’opposerait tôt ou tard à la jeunesse de plus en plus radicale. En vain. La preuve : le 24 novembre dernier, lors du vote pour les conseils de districts, les électeurs ont offert un triomphe aux candidats pro-démocratie. L’opposition a raflé la majorité dans 17 des 18 conseils de district, infligeant un sérieux camouflet aux candidats soutenus par Pékin
La stratégie de faire la sourde oreille face aux revendications de la rue s’est soldée par un « échec complet », aux yeux de Sébastian Veg, sinologue et directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS). « Cette approche n’a fait que nourrir l’escalade, note-t-il. Quand les manifestants demandaient plus de démocratie, on voyait en face un gouvernement de moins en moins réceptif aux demandes de la rue qui de surcroît, n’hésitait pas à relever le degré de violences policières et refusait de demander des comptes à la police. Il y a eu une sorte de spirale dans la surenchère. »
« La loi contre le port du masque était une provocation »
Mais forte du soutien de Pékin, la cheffe de l’exécutif ne lâche rien. Pire, Carrie Lam attise les tensions, quand elle interdit, au mois d’octobre, aux manifestants de porter un masque. Censée désamorcer la crise, cette loi produit l’effet inverse. « La loi contre le port des masques était une véritable provocation qui a entraîné de sérieuses violences, analyse Jean-Philippe Béja. C’est à partir de ce moment-là qu’on a commencé à brûler les magasins pro-chinois et à vandaliser les métros. » Mais le chercheur insiste : « À de très faibles exceptions près, la violence des manifestants était bien inférieure à celle de la police. »
Le 18 novembre, la loi anti-masque est jugée anticonstitutionnelle par la Haute Cour. Une victoire aux yeux du mouvement pro-démocratie qui ne désarme pas. « Pékin et le gouvernement de Hong Kong ont tenté de profiter de la montée de la violence pour diviser le mouvement, mais ils ont échoué », note Jean-Pierre Cabestan. Le chef du département des études internationales à l’Université Baptiste de Hong Kong et auteur du livre Demain la Chine, démocratie ou dictature ? (Gallimard, 2018) ne voit aucun affaiblissement du mouvement à l’horizon : « Le problème est qu’il n’y a pas le moindre dialogue. »
« Il y aura des peines très lourdes pour émeutes »
Plus d’un millier de manifestants inculpés pour actes de violence attendent aujourd’hui leur procès. Les premières audiences devraient s'ouvrir en mars prochain. « Il y aura des peines très lourdes pour émeutes », craint le chercheur Sébastian Veg qui n’exclut pas une nouvelle montée de fièvre : « Cela peut provoquer des manifestations importantes. »
Le risque de voir l’armée chinoise mettre fin aux aspirations démocratiques des Hongkongais lui semble pourtant faible. « Pékin souhaite éviter ce scénario à tout prix. D’ailleurs, rien ne prouve que l’Armée Populaire de Libération soit plus efficace que la police hongkongaise pour venir à bout de la contestation. » D’autant que les manifestants, sans véritable leader, ont adopté ce mode opératoire pour rester insaisissables : « be water », « soyez comme l’eau ».
Par RFI
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