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Trente ans après, on a retrouvé le sans-papiers « caché » des Pyrénées

Kerfala Damba, le 16 juin, à Cornillon-sur-l’Oule.
En 1989, « Le Monde » titrait : « Un Guinéen sans papiers “caché” dans les Pyrénées ». Sous le coup
d’une expulsion, Kerfala Damba était soutenu par sa commune d’adoption, sa cause médiatisée. Il est aujourd’hui le pilier d’un autre village, dans la Drôme.

Depuis sa terrasse ouverte sur l’horizon verdoyant des Baronnies provençales, l’Auberge de la Vallée de l’Oule propose un « Menu terroir » où la salade cabretta et la blanquette d’agneau sont en majesté. Cuisine traditionnelle française et produits locaux, voilà ce que la clientèle vient chercher dans ce restaurant de campagne, niché dans le sud de la Drôme.
Mais, en feuilletant la carte, certains sont surpris de découvrir deux spécialités sénégalaises, le maffé et le yassa. Et, au fil du repas, les palais les plus fins savent détecter, surtout dans l’accommodement des légumes, de subtiles saveurs épicées qui racontent un ailleurs.
Seul Africain à la ronde
La confirmation arrive quand, à la fin du service, le chef fait son tour de salle. Silhouette élancée dans sa tenue de cuistot, une énorme charlotte en guise de toque pour emprisonner ses dreadlocks, le patron passe de table en table, serre des mains, claque des bises et répond aux compliments par un généreux sourire saupoudré d’anecdotes.
Kerfala Damba, 52 ans, est un restaurateur épanoui, ici, chez lui, à Cornillon-sur-l’Oule, soixante-dix habitants. Un professionnel respecté : « premier employeur de la vallée », annonce-t-il fièrement, et seul Africain à la ronde.
A Cornillon, on sait qu’il est Guinéen. Mais, pour la plupart des gens, il vient surtout de Paris, d’où il est arrivé il y a dix ans pour ouvrir avec son épouse, Delphine, une auberge qui était restée fermée pendant des années. Pour ce qui s’est passé avant, ici, on n’est pas curieux. Et l’homme ne s’épanche pas sur les détails de sa vie passée : une histoire française qui commença dans les années 1980, dans le sillage turbulent des lois Pasqua.
A l’époque, le mot « migrant » n’avait pas encore colonisé le vocabulaire ; il y avait des immigrés, des sans-papiers, des clandestins. Souvent, comme Kerfala Damba, ils étaient les trois à la fois. Et, déjà, ils n’étaient pas les bienvenus.
Source: lemonde.fr

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