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"Joseph Kabila" contre "Moïse Katumbi" en RDC. Depuis la France, la juge Chantal Ramazani, qui a condamné M. Katumbi à trois ans de prison, affirme avoir agi "sous menace"

"Vous avez voulu tuer Moïse. Mais Dieu vous a confondu. Nous sommes derrière lui jusqu'à la mort":
les dimanches à Lubumbashi, cet hymne au martyr ne s'échappe pas du choeur des églises mais des tribunes du TP Mazembe, gloire de l'Afrique et de la République démocratique du Congo.
Grand prêtre des ultras du "100% Mazembe", Serge Iweza et ses 150 disciples entonnent à chaque match les louanges de Moïse Katumbi, président du club et opposant en exil.
Par la force du football, M. Katumbi, candidat à l'élection présidentielle prévue en décembre, reste présent en esprit dans sa lutte à distance contre le président Joseph Kabila, qui ne peut pas se représenter après deux mandats aux termes de la Constitution.

Ex-alliés, tous deux fils du Katanga minier, coffre-fort des ressources géologiques du pays, l'ex-gouverneur et le président se livrent à une bataille d'influence dans leur province grande comme l'Espagne, dont le démembrement en quatre entités a nourri leur divorce politique en 2015.
Dans la plupart des stades du monde, les supporteurs - même les ultras - paient pour encourager leur équipe. A Lubumbashi, ce sont les fidèles du "100% Mazembe" qui reçoivent un salaire pour chanter la gloire de "Moïse".
"Père de la démocratie congolaise"
"Nous ne serons jamais ingrats. Nos familles vivent dans de bonnes conditions grâce à lui", jure Serge Iweza. Le supporteur professionnel affirme même avoir refusé l'offre d'un parti pro-Kabila.
Le président Kabila, sommé par ses adversaires de déclarer publiquement qu'il va bien quitter le pouvoir, s'est rendu début juin à Lubumbashi, un déplacement aux allures de tournée pré-électorale.
Le chef de l'Etat a inauguré une série d'édifices présentés comme le symbole de sa volonté de moderniser le Congo, à grand renfort d'affiches géantes dans la ville saluant "le père de la démocratie congolaise".

En sa présence, devant les caméras de la chaîne d'Etat RTNC, le bourgmestre d'une des communes de Lubumbashi a soutenu avec ferveur sa candidature à la prochaine présidentielle, sujet explosif à l'approche de l'ouverture du dépôt des dossiers le 25 juillet.
"J'ai reçu des messages de félicitations", affirme le bourgmestre PPRD (parti présidentiel), Augustin Kahozi Bin Malisawa.
Surnommé "bulldozer" pour sa carrure massive, Kahozi reprend la thèse d'un juriste qui a enflammé les réseaux sociaux: Kabila n'a fait qu'un seul mandat sous le mode de scrutin actuel instauré en 2011 (présidentielle à un tour).
Les partisans de Katumbi, réunis au sein de la coalition Ensemble, affirment qu'ils sont empêchés de faire campagne au Katanga. "Cela fait deux ans que la siège de mon parti Unafec est sous scellé", dénonce Gabriel Kyungu Wa Kumwanza, figure historique du Katanga et du Congo. Le portrait de Katumbi, qui ornait la porte d'entrée du siège d'un autre parti (le PND), a été incendié en juin.
Les magistrats dénoncent
Les "katumbistes" vivent dans l'attente du retour maintes fois annoncé de leur héros, parti en mai 2016 pour se faire soigner à l'étranger puis condamné dans une affaire immobilière.
Les deux juges de Lubumbashi chargés de l'affaire ont fui la RDC en dénonçant des pressions du pouvoir et de ses cadres katangais. Depuis l'Afrique du Sud, Jacques Mbuyi accuse directement les autorités d'avoir commandité la tentative d'assassinat dont il a été victime à Lubumbashi en juillet dernier.
Depuis la France, la juge Chantal Ramazani, qui a condamné M. Katumbi à trois ans de prison, affirme avoir agi "sous menace".
Il reste que cette condamnation bloque le retour de M. Katumbi à un mois du dépôt des candidatures. "S'il revient, il sera entre les mains de la justice", a affirmé dimanche le ministre congolais des Affaires étrangères, Léonard She Okitundu.

Le frère de Moïse Katumbi, Abraham Soriano, parti avec lui en mai 2016, a pu rentrer sans encombre début juin à Lubumbashi.
La bataille pour le Katanga passe enfin sur le terrain des intérêts privés. Les adversaires de Katumbi l'accusent d'avoir précipité la ruine des chemins de fer congolais avec ses trois sociétés qui transportent des chargements de cuivre et de cobalt à bord de camions sous surveillance satellitaire.
"Si ces sociétés m'appartenaient, elles auraient déjà été fermées. Tout ce qui m'appartient a été fermé", affirme M. Katumbi. "Pour éviter tout conflit d'intérêt, j'ai vendu mes sociétés Hakuna Matata et MCK quand j'ai été élu à la tête de la province (en 2007)".
M. Katumbi n'a vendu MCK qu'en 2015 pour environ 140 millions de dollars au français Necotrans. Il affirme n'avoir touché que 20 millions de dollars. Le tribunal de commerce de Paris lui a donné raison en mai en appel contre le Français Pascal Beveraggi...En février, l'avocat du Corse avait disposé d'une longue tribune dans un journal proche du pouvoir.
VOA Avec AFP

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