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SECESSION ANGLOPHONE, CAS D’ECOLE D’UNE IMPASSE POLITIQUE


SECESSION ANGLOPHONE, CAS D’ECOLE D’UNE IMPASSE POLITIQUE

Une impasse peut se définir comme une situation où toute décision est toujours contreproductive. C’est exactement ce que nous vivons avec le problème anglophone.
Ce qu’il fallait éviter dès le départ, c’est la transformation du mouvement anglophone en sécession armée. Car, quand cela arrive, c’est une plaie qui ne peut plus se cicatriser et le Gouvernement ne peut plus rien. Toutes les mesures qu’on tente de prendre ne fait qu’aggraver la situation.
D’un côté, le Gouvernement ne peut rester les bras croisés face aux provocations et agressions sécessionnistes. Mais de l’autre côté, ces réactions du Gouvernement ne font que nourrir la Sécession. On aboutit à une impasse politique, où la répression se nourrit de la violence et la violence se nourrit de la répression, dans un jeu de ping-pong sans fin !
C’est cette spirale infernale qu’il fallait éviter à tout prix, et c’est dans cette perspective que s’inscrit l’arrestation du soi-disant « Président ambazonien » au Nigeria, laquelle a suscité une joie de ceux qui croient pouvoir éradiquer ce mouvement par la force, en décapitant notamment son sommet.
En réalité, une telle arrestation pose le terrible problème de gestion de la situation et présage d’un échec diplomatique.

1. LA GESTION DU PROBLEME ANGLOPHONE

A maintes reprises, j’ai insisté sur la nature très spécifique de la Sécession qui est une rébellion très particulière, et dont la caractéristique est qu’elle ne meurt jamais. Ce n’est pas une rébellion simple dont il suffit de décapiter la tête ou qui vieillit, mais un mouvement de refus dont la haine des enfants se nourrit du sentiment d’oppression et de l’humiliation subie par les aînés et des désirs irrépressibles de les venger.
Dans ces conditions, les victoires militaires n’ont pas la même signification que dans une rébellion de type charismatique, où il suffit de neutraliser les Chefs pour la liquider. D’ailleurs, l’arrestation des responsables aggrave souvent le problème au lieu de la calmer ! Par exemple, le Chef emblématique de la Sécession kurde Ocalan avait été extradé en Turquie, mais cela n’a joué aucun rôle dans la sécession kurde, bien au contraire, et on peut en citer autant pour un nombre incommensurable de Sécessions de par le monde.
Au Cameroun, la situation s’aggrave du fait que les individus arrêtés n’ont aucun rôle historique, se contentant d’assumer les responsabilités politiques ad hoc, certainement pour leur profil et la bonne image que par leur influence politique et militaire réelle.
Et en décapitant une tête politique, somme toute assez molle et très amatrice, on conforte le camp de ceux pour qui le seul discours à opposer au Gouvernement est la guerre totale.
Il y a donc une dangereuse perspective pour des professionnels de la guérilla totalement incontrôlables et qui agissent, non plus pour se pavaner dans les hôtels devant les journalistes, mais pour combattre durement et tuer. Et cette radicalisation s’accompagnera d’une extension des cibles au-delà des installations publiques et du personnel en uniforme, et il y a lieu de craindre des enlèvements pour procéder aux échanges.
En fait, le plus à craindre quand les responsables sont arrêtés dans une sécession est une décentralisation de la violence pratiquement incontrôlable, faute d’une instance faîtière qui peut réguler leur comportement et imposer le respect des règles minimales de guerre, tout en offrant une perspective de négociation.
Cette cancérisation de la violence se dessine déjà, avec le meurtre d’un inspecteur de police et la mutilation d’un gendarme qui ont lieu avant-hier et sont passés presqu’inaperçus. Conséquence de la spirale infernale, où de tels meurtres sont en cours de passer pour des événements courants ! Est-on sûr que ce sont les responsables de la Sécession qui ont ordonné cette opération ? Qu’ils sont même au courant ? Il y a un risque que cette sécession éclate en mille franchises, sans un contrôle au sommet, ce qui serait l’enfer.
(Voir http://ift.tt/2FdlbZ4)

2. VERS UN AUTRE ECHEC DIPLOMATIQUE

Certains sites ont affirmé que l’interpellation aurait été réalisée par les forces camerounaises. C’est invraisemblable, car on n’imagine pas le Nigéria accepter ce genre d’infiltration sur son territoire, dans sa capitale Lagos qui est plus peuplé que tout le Cameroun, et dans un problème aussi sensible et aussi médiatique que la rébellion anglophone. Quand bien même le Nigeria aurait été d’accord avec les mandats d’arrêt lancés par le Gouvernement du Cameroun, c’est lui-même qui aurait procédé aux arrestations suivies d’une extradition, car ils n’ont pas traversé la frontière pour que le Cameroun exerce le droit de poursuite, seul cas où une telle infiltration serait acceptable.
(http://ift.tt/2Ei6QcO)
Que pourrait donc attendre le Cameroun de ces arrestations ? Pas grand-chose en réalité ! Il n’y a pas lieu de les extrader, car ces gens sont connus comme des Sécessionnistes du Southerns Cameroon, les accusations de terrorisme que nous leur conférons s’arrêtant aux frontières du Cameroun et n’engageant pas les pays étrangers. Leur mouvement n’a pas encore, pour le moment, été qualifié de terroriste ni par l’ONU, ni par une puissance qui compte.
Du reste, les Sécessionnistes auraient été arrêtés dans un Hôtel à Lagos, autrement dit, dans un endroit policé où ils n’avaient certainement pas d’armes pour être accusés d’avoir violé la loi nigériane. C’était plus une collusion pour aller mener des actions de déstabilisation d’un pays voisin dans le cadre d’un mouvement séparatiste, autrement dit, politique.
Et c’est cela mon interprétation : le Gouvernement Nigérian leur aurait demandé de se tenir tranquilles et d’arrêter leurs complots contre un pays voisin. Mais ils ont continué et le gouvernement les a arrêtés, non pour les remettre au Cameroun, ce qui est absolument inenvisageable. Et le mieux que le Cameroun puisse obtenir est de les voir expulser du territoire nigérian.
Ce qui n’est pas une victoire diplomatique, bien au contraire !

3. COMMENT RESOUDRE LE PROBLEME ANGLOPHONE ?

Certains Camerounais, nostalgiques d’un Etat arcbouté à fabriquer ses « unités nationales », restent désespérément accrochés au rêve dément d’un Cameroun qui peut retrouver la tranquillité qu’imposait la chape de plomb du parti unique.
Lisant de manière orientée tous les événements pour y trouver des motifs d’espoir pour la pérennité de leur Cameroun « un et indivisible », ils espèrent à coups de répression éradiquer le problème anglophone.
On les rencontre au sein du Gouvernement, mais aussi auprès des cryptocommunistes, et certains nostalgiques du Parti unique et de la DIRDOC. C’est précisément eux qui ont poussé le Gouvernement à de très mauvais choix.
Et comme si cela ne suffisait pas, voici qu’ils se mettent à écrire l’histoire de l’Ambazonie, celle que raconteront leurs livres d’histoires et que chanteront leurs poètes : comment la République Francophone les avaient trompés, comment ils se sont battus pour sortir de l’occupation francophone, quels ont été leurs grands coups, quels sont leurs héros et leurs martyrs. Exactement ce que font les livres d’histoire de l’Erythrée avec l’Ethiopie, du Sud-Soudan avec le Soudan, du Somaliland avec la Somalie, pour ne citer que l’Afrique.
Le Gouvernement a fabriqué un cancer que le Cameroun traînera à tout jamais et aucune circonstance n’y pourra mettre fin. La logique de la « Pax Francophonia » promue par les extrémistes francophones risque de conforter l’impression des Anglophones qu’ils ont été conquis, ce qui ne pourra qu’exacerber la haine contre le Cameroun. C’est une faute politique, et il est puéril de tenter de forcer l’adhésion à de telles positions, à travers des menaces d’accusation de soutien à la Sécession. Personne ne peut soutenir la logique des Sécessionnistes, mais il faut bâtir la paix en répondant aux désirs de tous les segments du Cameroun.
Le mal est fait, la Sécession est là et elle ne disparaitra plus jamais. C’est un perd-temps de croire qu’on peut y changer quoi que ce soit. La seule chose à faire est de suivre l’exemple des pays qui l’ont connue, à savoir la sous-traiter par les Etats Régionaux. Les Etats Fédérés sont mieux armés pour combattre la Sécession : d’abord parce qu’ils réduisent drastiquement les adhésions, ensuite parce qu’ils connaissent mieux le terrain, et peuvent compte sur le soutien de la population.
La fédéralisation du Cameroun est la seule solution, et il n’y a pas d’autres. Et c’est vers cela qu’il faut aller.
Dieudonné ESSOMBA
 

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