Loading...

Dieudonné Essomba:QUE FAIRE DES ENTREPRISES A CAPITAUX PUBLICS AU CAMEROUN ?

L’image contient peut-être : 1 personne 
L’une des plaies de notre pays, qui alimentent les déprédations, les clientèles politiques et les
récriminations tribales restent les entreprises à capitaux publics.
Dans le cadre de l’Etat unitaire, ces entreprises sont devenues des appendices de l’administration centrale dont les postes de Directeur Général sont assimilés aux strapontins ministériels qu’on partage aux tribus dans le cadre de la construction de leur unité nationale administrative, pour calmer les corporations ou entretenir et les réseaux d’argent.
Elles ont été détournées de leurs missions de production pour devenir des ulcères sur le corps de la Nation. Et alors que dans un pays normal du niveau Cameroun, l’Etat doit en attendre des dividendes pouvant représenter 25% de son budget, elles apparaissent plutôt comme des gouffres à subventions, la majorité ne survivant que dans un état de mort-vivant.
Quelles sont les diverses perspectives pour les redresser ?
1. LA SOLUTION DES GESTIONNAIRES COMPETENTS
Certains soutiennent la démarche actuelle de gestion, mais proposent la nomination des « bons gestionnaires ». Mais outre qu’il est difficile de mesurer a priori qui est bon gestionnaire et qui ne l’est pas, il faut dire que par principe, il est pratiquement impossible d’être un bon gestionnaire au Cameroun. En effet, le DG qu’on nomme devra alimenter les réseaux qui lui ont donné le poste et l’y maintiennent, remplir les fins de mois du Ministre de tutelle, financer la campagne du parti au pouvoir, assurer ses fonctions d’élites en organisant des fêtes en ville et au village, financer la construction de l’église de son quartier sans compter les emplois qu’il doit ménager à ses nièces et les fils de ses amis !
Et les Conseils d’administration de ces structures ne sont que des fictions composées de fonctionnaires qui n’ont absolument aucun intérêt dans l’affaire dont ils se fichent comme d’une guigne, leur préoccupation se limitant à raccourcir les séances des Conseils pour rapidement donner le quitus et aller prendre leurs jetons de présence, qui restent en réalité leur seule motivation.
Il n’y a donc pas de solution dans les Gestionnaires-messies.
2. LA SOLUTION DE LA PRIVATISATION
Une autre piste est la privatisation et personne ne peut en contester l’efficacité dans l’amélioration de la gestion, car il y va des intérêts des gestionnaires. Néanmoins, la privatisation a de graves défauts qui l’empêchent d’être une perspective pour le développement de nos pays :
1. ELLE PLOMBE LA GESTION DANS LE COURT TERME : en effet, le secteur privé ne prend pas de risques à long terme dans un environnement comme le Cameroun qui peut être affecté à tout moment d’accidents divers : crises économiques, instabilités politiques, guerres civiles, coups d’Etat, rebellions, etc. Le secteur privé, surtout étranger n’engagera jamais des investissements dont le retour est trop long (20 ans). Or, ce sont ces investissements à long terme qui ont un rôle structurant pour le développement.
2. L’ARRIMAGE DE LA VIABILITE DES ENTREPRISES A LEUR RENTABILITE FNANCIERE : Ce point extrêmement important permet de faire la différence entre rentabilité financière et rentabilité économique. Lorsque la Banque donne un crédit à une entreprise comme la CAMSUCO qui produisait le sucre, elle attend que le promoteur dégage des bénéfices pour venir lui rembourser son argent. Et si elle ne dégage pas ce bénéfice, la banque ne fera pas le crédit.
Par contre, l’Etat va raisonner autrement. En effet, la création de la CAMSUCO va concentrer une population initiale d’ouvriers qui vont, grâce à leur demande, créer une ville, avec un nombre important d’activités supplémentaires qui lui procurent l’impôt : boutiques, garages, bars, supermarchés, stations d’essence, boulangeries, etc.
L’Etat va donc raisonner sur la base des impôts qu’il perçoit non seulement de la CAMSUCO, mais aussi des activités supplémentaires qui apparaîtront, ce que ne peut faire la banque.
Un Etat doit donc financer les activités économiquement rentables, mêmes si leur rentabilité financières est faible, voire négative. Ne pas le faire et prétendre appuyer son développement uniquement sur le secteur privé, c’est tordre le système productif pour le mener vers un capitaliste mercantile sans profondeur.
3. CONTRAINTES OPERATOIRE : Le privé a d’importantes contraintes opératoires que seul, peut lever l’Etat. Sur le plan du financement, l’Etat est le seul acteur qui peut se constituer une épargne d’autorité, en prélevant les impôts et en les recyclant en investissements. Il n’a pas besoin d’épargner comme le ferait un ménage ou une entreprise. De même, il est le seul qui peut casser des rigidités de type sociologique, par exemple l’expropriation de la terre pour des activités de développement.
4. EXTRAVERSION DE NOTRE ECONOMIE : au Cameroun, les capitaux étrangers représentent 56% de capitaux, logés dans les secteurs les plus productifs : agriculture industrielle (CDC, SOCAPALM, HEVECAM,…), industries (ALUCAM, SABC, cimenteries,…), hydrocarbures (SNH) énergie (ENEO), eau (CDE), transport (CAMRAIL, gestion des ports), télécommunications (Orange, MTN, NEXTEL), les potes et logistique (DHL), Banques, Hôtels (HILTON, Mont-FEBE…), commerce (supermarchés, SHO, CAMI Toyota,…), jeux (PUMC, Paris divers), etc.
Viennent ensuite les capitaux publics qui représentent 31% du total, et sont logés dans des structures mixtes ou dans des secteurs peu rentables.
Quant au privé national, il reste confiné dans des activités interstitielles abandonnées par les multinationales et ne représente que 14%. Cela peut paraître étrange, mais c’est logique quand on sait qu’un seul Boeing de 80 Milliards achète tous les taxis du Cameroun, une seule centrale électrique tous les auberges que nous affublons pompeusement du nom d’hôtel, et un seul paquebot toute la quincaillerie que nous appelons agences de voyage.
Or, la privatisation des entreprises publiques ne peut profiter au secteur privé, beaucoup trop faible pour compéter avec des capitaux étrangers.
Eu égard à ces limites, le secteur privé ne présente aucune perspective de développement au Cameroun.
3. LA SOLUTION FEDERALE
Le Cameroun ne peut se développer qu’avec l’intervention de l’Etat, seul acteur national capable de mobiliser d’importantes ressources pour financer les activités structurantes du secteur productif, qui présentent la caractéristique d’être économiquement rentables, mais sans l’être financièrement. Et même quand elles le sont, leur retour d’investissement est trop long. Elles ne peuvent donc être financées que par des ressources très longues ou même à fonds perdus du type impôts.
Mais comme on l’a vu, un tel capitalisme n’est pas possible dans un Etat unitaire. La solution consiste donc à remplacer le capitalisme d’Etat au sens ancien par un capitalisme d’Etat nouveau, où le propriétaire n’est plus l’Etat central avec des DG nommés par le Chef de l’Etat dans une logique politicienne, mais où les propriétaires sont les Etats régionaux, qui ont engagé leurs capitaux et les surveillent en attendant des dividendes.
L’Etat Central se bornera à prélever ses impôts et à encadrer l’activité pour que tout marche bien.
La première mesure consiste donc à partager toutes les prises de participations de l’Etat Camerounais aux Etats régionaux. Que ce soit la SNH, la SONARA, la CSPH, la SIC, CAMTEL, les Hôtels, les agroindustries, la CNPS, les ADC, CAMERCO, toutes les actions sans exception aucune doivent être réparties entre les Etats Fédérés sur la base de la clé suivante :
Yaoundé------------------------------5,6%
Douala--------------------------------6,0%
Bamenda------------------------------1,1%
Garoua--------------------------------1,0%
Adamaoua---------------------------4,72%
Centre------------------------------ 12,6%
Est------------------------------------ 5,1%
Extrême-Nord ----------------------13,5%
Littoral--------------------------------6,5%
Nord----------------------------------7,6%
Nord-Ouest-------------------------10,7%
Ouest-----------------------------------13,0%
Sud------------------------------------4,1%
Sud-ouest-----------------------------8,5%
Il reste entendu que ces parts ne s’appliquent que sur le portefeuille actuel de l’Etat Central.
Evidemment que chaque Etat régional dispose d’une structure qui gère son portefeuille d’actions et ses placements. Elle pourra renforcer les siennes à son gré pour les investissements à venir ou les réduire en vendant ses parts, c’est son affaire !
L’actuelle Société Nationale d’Investissement qui gère le portefeuille de l’Etat devient une structure de Conseil et d’Audit au profit des Etats Régionaux.
Toutes ces entreprises doivent aller en bourse.
4. LES SOCIETES DE GESTION
Les Etats Régionaux qui sont désormais les propriétaires des entreprises à capitaux publics ne nomment pas les dirigeants de ces entreprises. Ils créent un Conseil de Surveillance composés des délégués représentant les Etats régionaux au prorata de leurs parts respectives.
Ce sont ces Conseils qui sélectionnent une Société de Gestion pour gérer l’entreprise sur la base d’un cahier de charges portant notamment sur les dividendes attendues et la préservation du patrimoine, mais aussi l’emploi et les impôts.
La même règle de gestion s’applique à toutes les entreprises à capitaux publics à venir, car il faut mettre définitivement fin aux influences politiciennes qui empoisonnent la gestion des entreprises au Cameroun.
Les Sociétés de Surveillance sont des sociétés privées de droit camerounais, composées de Camerounais qui présentent les aptitudes requises, sur un modèle proche de la concession d’exploitation. Elles ne s’occupent pas de l’investissement qui est décidé par les Actionnaires, autrement dit, les Responsables des Etats régionaux, chacun à sa convenance.
Pour avoir une concession de gestion d’une Entreprise à capitaux publics, la Société de Surveillance doit déposer une caution, ou avoir l’aval d’une banque ou d’un Etat Régional. En cas de pépins, les actionnaires savent à quoi s’en tenir, car dans ce pays de « frappe » appelé Cameroun, on n’est jamais trop prudent !
Dieudonné ESSOMBA

Subscribe to receive free email updates:

0 Response to "Dieudonné Essomba:QUE FAIRE DES ENTREPRISES A CAPITAUX PUBLICS AU CAMEROUN ?"

Post a Comment

Loading...