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International - Corée du Nord : le spectre des armes chimiques

Le Parisien: Kim Jong-nam et Kim Jong-un.
© (AFP/Toshigumi Kitamura/Ed Jones) Kim Jong-nam et Kim Jong-un. 
 La crainte d'une attaque chimique sur la Corée du Sud ou le Japon grandit de semaine en semaine.

«Nous vaincrons toute attaque par arme conventionnelle ou nucléaire». Depuis le pont du porte-avion Ronald Reagan, le vice-président américain Mike Pence a apporté une nouvelle pierre, mercredi, à l’escalade verbale entre la Maison Blanche et Pyongyang.
Alors que Donald Trump a promis de «traiter le problème» que représente le régime nord-coréen, celui-ci a d’ores et déjà répondu, par la voix de son représentant à l’ONU, qu’il se tenait prêt à «répondre à une guerre totale». Chaque mouvement est scruté de près par la communauté internationale, alors que la Corée du Nord multiplie les tirs de missiles d’essai en mer du Japon.
L’état d’avancement de son programme nucléaire inquiète. Mais derrière cette menace de l’atome s’en cache une autre : celle d’une attaque chimique menée contre les voisins sud-coréens ou japonais, tous deux alliés des Etats-Unis. A Tokyo, cette perspective est déjà un motif de préoccupation et le Premier ministre, Shinzo Abe, a souligné la semaine dernière qu'un bombardement nord-coréen au gaz sarin était désormais «possible».

Un arsenal chimique de premier plan

S’il est impossible d’estimer avec précision l’étendue de l’arsenal à disposition de Kim Jong-un, les témoignages et observations récentes recueillis par la communauté internationales permettent d’en établir le danger élevé. «La Corée du Nord possèderait l’un des plus importants stocks d’armes chimiques dans le monde», affirmait un rapport d’une commission d’enquête de l’ONU, un document daté de 2015, évoquant également des «stocks» importants.
«C’est sans doute le dernier arsenal chimique militaire d’importance dans le monde avec des substances de dernière génération», confirme au Parisien Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) et expert en armes chimiques. «Il reste aujourd’hui très peu d’Etats sur lesquels pèsent encore ce type de soupçons». La Corée du Nord fait en effet partie des trois pays non-signataires de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, avec l’Egypte et le Sud-Soudan.  

Des témoignages glaçants

 
Les témoignages récupérés auprès de Nord-Coréens ayant fait défection confirment la détermination du régime à poursuivre le développement de cet arsenal coûte que coûte. Quitte à se servir de la population pour tester les agents chimiques.  
«Nous avons recueilli des témoignages troublants sur une île où des tests d’armes biologiques et chimiques sont conduits sur des handicapés, détaillait il y a trois ans le rapport des enquêteurs l’ONU. Un ancien haut dirigeant, travaillant pour le ministère de la Sécurité publique, a assisté à des arrestations de personnes envoyées dans un bâtiment appelé ‘Hôpital 83’, où des médecins lui ont déclaré qu’ils allaient être utilisés pour des expérimentations.»
En juin 2015, le Daily Telegraph britannique relatait les propos d’un autre scientifique, exilé au milieu des années 1990 : «pour tester les armes biologiques et chimiques, nous avions besoin d’"objets". Au début, les instructeurs utilisaient des souris. Puis ils ont fait des tests sur des humains pour nous montrer de quelle manière ils mouraient.»

Un assassinat politique à l'arme chimique en guise de message

Si ces récits concordants ne peuvent être formellement confirmés, un événement récent est venu appuyer l’avancée du régime sur le développement des armes chimiques. Le 13 février dernier, le demi-frère dissident de Kim Jong-un, Kim Jong-nam, a été assassiné à l’aéroport de Kuala-Lumpur (Malaisie). Selon les autorités malaisiennes, le meurtre, imputé aux services secrets nord-coréens, a été réalisé à l’aide de gaz VX, un neurotoxique dix fois plus puissant que le gaz sarin et classé comme arme de destruction massive.
Kim Jong-nam (à gauche), demi-frère de Kim Jong-un (à droite).(AFP/Toshifumi Kitamura/Ed Jones)
«Le fait qu’il ait été tué de cette manière, en plein centre d’un terminal parmi les plus fréquentés d’Asie, devant des caméras de surveillance, c’est un message», estime Olivier Guillard, chercheur associé à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), spécialiste de l’Asie. «D’abord pour signifier aux opposants politiques que Pyongyang peut agir aussi bien sur son propre territoire qu’à l’étranger, ensuite pour montrer qu’il possède cet agent neurotoxique, qu’il le maîtrise et qu’il peut potentiellement s’en servir d’une manière industrielle.»

L’arsenal balistique pour frapper ses voisins

La crainte d’une attaque chimique exprimée par le Japon est d’autant plus crédible que Kim Jong-un possède les moyens techniques de frapper ses plus proches voisins. «Aujourd’hui, la Corée du Nord a au moins trois types de missiles viables et capable d’atteindre toute la péninsule coréenne et tout l’archipel nippon, précise Olivier Guillard. Deux des trois ennemis mortels de la Corée du Nord sont à portée de tir à 100%.»
Et les agents chimiques sont bien plus aisés à intégrer dans une ogive qu’une arme nucléaire, dont la miniaturisation représente un premier défi très délicat à relever. «Les technologies pour développer un missile ou un obus chimiques sont relativement simples, confirme Olivier Lepick. En utilisant des engins de courte ou moyenne portée, il est possible d’aller délivrer les agents chimiques à des distances relativement importantes.» 


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