Pendant longtemps, on a pu penser que la situation en Corée du Nord était moins dangereuse qu’il n’y paraissait. Les dirigeants nord-coréens étaient des maîtres chanteurs rationnels : ils brandissaient
l’arme nucléaire comme une garantie de survie.Pour les États-Unis, cet enjeu ne valait pas les risques d’une frappe. En premier lieu, le risque de provoquer une riposte suicidaire de Pyongyang. Mais aussi de faire enrager la Chine, qui ne veut à aucun prix de l’effondrement de la Corée du Nord. Consterner les Coréens du Sud, pour qui ceux du Nord sont un peuple frère. Paniquer le Japon, qui sera en première ligne si les missiles volent.
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L’arsenal nord-coréen approche aujourd’hui d’un seuil de dangerosité critique. Pyongyang dispose désormais de missiles à carburant solide (rapides à mettre en œuvre), lancés à partir de rampes mobiles (difficiles à repérer). Le moment où il disposera d’un engin capable de frapper l’Amérique semble se rapprocher.
Sur le plan humain, Kim Jong-un et Donald Trump changent la donne. Le grand-père et le père du jeune Kim étaient des lutteurs expérimentés qui connaissaient les horreurs de la guerre. Le jeune Kim a hérité du pouvoir, à 28 ans, après une enfance gâtée en vase clos. Pour ce qu’on sait, il adore les films d’action et n’hésite pas à faire assassiner des membres de sa famille. Sur son siège de pacotille, entouré d’intrigues, il cumule manifestement paranoïa et folie des grandeurs.
Face à Ubu-Kim : Super-Trump !
Et qui trouve-t-on désormais face à Ubu-Kim ? Super-Trump ! Le nouveau président américain ne croit qu’aux rapports de forces. Il n’a pas exclu d’utiliser l’arme nucléaire. Sa frappe en Syrie, au moment même où il recevait Xi Jinping, a été un coup de maître. Les yeux dans les yeux avec le maître de la Chine, il a montré qu’il pouvait tout oser. Les médias occidentaux l’encensent. Décapiter et désarmer la Corée du Nord ferait de lui un géant. Résistera-t-il à la tentation d’essayer, s’il se persuade que c’est faisable ?
L’aéronavale américaine est en route. Des frappes très ciblées sont susceptibles de paralyser un petit pays où le pouvoir est concentré à l’extrême.
Si Trump tente le coup, tout est possible. S’il le manque, Pyongyang a les moyens d’une riposte suicidaire : une artillerie capable de frapper Séoul, à moins de 60 kilomètres de la frontière, des missiles portant jusqu’au Japon.
S’il le réussit, on ne saurait exclure l’entrée des troupes chinoises en Corée du Nord pour « rétablir le calme et protéger la souveraineté du pays ». La Chine enrage de voir les États-Unis, arguant du danger nordiste, déployer au Sud un système de défense antimissile ultra-perfectionné, surtout dirigé contre elle. Et on voit mal Pékin laisser à Washington le droit de frapper à son gré un pays voisin qu’il considère comme son protégé.
Scénario possible (souhaitable ?) : Kim Jong-un pourrait être victime d’un complot, dont les auteurs se feraient payer au prix fort, par l’Occident et la Chine : le retour de Pyongyang dans le jeu diplomatique normal. Quand Donald Trump presse la Chine de « s’occuper du problème », sans doute pense-t-il à ce scénario, plus encore qu’à des sanctions économiques de Pékin contre le Nord. L’opacité du régime ne permet pas d’en évaluer les chances. Mais celles de réussir une intervention extérieure sans provoquer une crise régionale majeure ne semblent guère meilleures.
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